Les brèves

L’universalité du racisme

Lionel Zinsou, créée le 14-06-2020

"Je voudrais vous recommander le livre d’un professeur, moi qui crois à l’éducation et à l’Histoire. Jean-Loup Amsellea publié il y a quelques semaines ce petit livre. C’est quelqu’un qui a co-écrit « en quête d’Afrique » avec Souleymane Bachir Diagne, qui était déjà excellent. C’est un grand anthropologie de l’Ecole des Hautes Études. Cela nous rappelle que le racisme est minoritaire partout, mais qu’il est aussi universel. "


Hommage à Robert Poujade

Jean-Louis Bourlanges, créée le 14-06-2020

"Le confinement a eu des effets graves sur mon approvisionnement en journaux, ce qui fait que je n’ai pas appris le décès, début avril, d’un homme qui a beaucoup compté pour moi : Robert Poujade. Il faut saluer sa mémoire, car c’était un homme politique comme on n’en verra plus, et qui à mon avis faisait honneur à la société politique. C’était un littéraire, normalien, il croyait à la puissance des mots. Gaulliste d’après-guerre (puisque trop jeune pour être résistant). Il était extrêmement brillant, c’est lui qui a créé le ministère de l’environnement, à une époque où cette problématique était extrêmement difficile à faire entendre. C’était un précurseur, dont la mémoire doit être saluée, ainsi que l’esprit. Pendant le mandat du président Giscard, alors que Chirac s’impatientait, il m’avait décrit ce dernier de façon remarquable : « Le problème de Jacques Chirac est qu’il est habitué à vivre dans une république où les présidents ne finissent pas leur mandat ». C’était le genre d’observation distante et ironique dont cet homme était capable. "


Les vérités inavouables de Jean Genêt

Philippe Meyer, créée le 14-06-2020

"« Monition ». Monition est un mot issu du droit canon et qui signifie avertissement adressé par l’autorité ecclésiastique avant que ne soit infligée une censure. Le dérèglement du climat intellectuel fait que, chaque année, il pleut davantage de monitions sur les réseaux sociaux, puis dans ceux des médias qui croient y entendre la vox populi, réseaux et médias qui ont désormais remplacé l’autorité ecclésiastique. Ces derniers mois, les monitions ne tombent pas en pluie, mais en rafales et en giboulées. Ces dernières semaines, ces derniers jours, ce ne sont plus des rafales et des giboulées, c’est la mousson.  Des quantités de personnes notoires ou avides de le devenir, se précipitent à la recherche tantôt d’un gredin, scélérat, à moucharder, tantôt d’une victime à chaperonner. Ils entraînent derrière eux followers et journalistes. Pour que ces intentions aient de la noblesse, il faut qu’elles relèvent d’un souci de justice plutôt que du souci de soi. Pour qu’elles relèvent d’un souci de justice, il faut que les affaires sur lesquelles se prononcent ces personnes soient instruites à charge et à décharge. Or les charges sont toujours présumées et de décharge, on n’observe guère que la décharge d’adrénaline que procure à des bourreaux en herbe la perspective de faire tomber des réputations comme au chamboule-tout. A tous ces exécuteurs précoces, je propose un livre de l’historien Ivan Jablonka paru au Seuil en 2005. Ils y verront comment leurs prédécesseurs, dont beaucoup sont encore en service, on fait passer pour une victime, et même pour une sorte de porte-parole de toutes les victimes du monde, un écrivain qui avait célébré la radicalité du nazisme et de la milice et qui chanta la poésie du massacre d’Oradour sur Glane, où, il y a 76 ans, une unité de Waffen SS massacra 642 habitants, hommes, femmes et enfants. Le livre s’intitule « Les Vérités inavouables de Jean Genêt »."


Retour de service

Nicole Gnesotto, créée le 14-06-2020

"Je voudrais vous parler aujourd’hui du dernier roman de John Le Carré, qui vient de sortir. Je ne l’ai pas encore terminé, mais l’ouvrage est absolument passionnant? Je suis une fan de John Le Carré depuis « une petite ville en Allemagne ». Le Carré décrit la société britannique du Brexit avec une acuité extraordinaire. Il est à la fois un très grand romancier et un très grand journaliste politique. J’espère que la fin sera à la hauteur du début !"


L'énigme de la chambre 622

Nicole Gnesotto, créée le 07-06-2020

"Je serai beaucoup plus superficielle, et j’aimerais vous parler du best-seller annoncé de l’été, le quatrième roman de Joël Dicker, d’ores et déjà en tête des listes de vente, premier tirage à 400 000 exemplaires. J’ai un sentiment très ambivalent, et je vous le livre. A la fin des 659 pages, quand vous refermez le livre, vous vous dites : « c’est vraiment nul ». Et pourtant durant toute la lecture se produit un phénomène d’addiction à l’intrigue qui est assez exceptionnel. Au final, je ne sais pas ce qui l’emporte : le plaisir de l’intrigue ou la déception d’avoir perdu son temps pour ce qui est tout, sauf de la littérature. "


Fermeture de l’UGC George V

Philippe Meyer, créée le 07-06-2020

"Nous avons donc appris cette semaine qu’un cinéma situé depuis 82 ans sur les Champs Élysées, l’UGC George V, ne rouvrirait pas ‪le 22 juin‬, contrairement aux autres salles. La covid-19 n’y est pour rien. C’est le propriétaire des murs, la société Groupama qui en a décidé ainsi, parce qu’il juge le loyer « insuffisant ». Pas parce que l’UGC lui fait perdre de l’argent, pas parce que l’UGC George V ne lui rapporte rien, simplement parce que cette salle de cinéma ne lui rapporte « pas assez » et qu’il préfère la transformer en hôtel. Groupama est aussi propriétaire des murs du théâtre de l’Athénée que dirigea Louis Jouvet, de 1945 à sa mort. Le directeur de ce théâtre, qui a porté à 75% le taux de fréquentation de sa salle, essaie en vain depuis plusieurs années de faire adouber par le ministère de la Culture le projet de rachat des murs de l’Athénée par une fondation dont il a rassemblé les potentiels donateurs. Peut-on espérer que la fermeture de l’UGC George V secoue l’immobilisme de la rue de Valois ?"




L’Aigle, le Dragon et la crise planétaire

Béatrice Giblin, créée le 07-06-2020

"C’est un ouvrage qui correspond très bien à nos discussions d’aujourd’hui, puisqu’il s’interroge sur la rivalité entre Chine et USA à l’aune des changements climatiques. Les deux puissances connaissent des phénomènes climatiques extrêmes, qui risquent de les pénaliser très fortement, or elles sont les plus grosses productrices de gaz à effet de serre, se livrent à une compétition féroce sur l’accès au ressources, font peser un poids très lourd sur la biodiversité, etc. D’une certaine façon, la course à la puissance de ces deux géants pourrait bien les mener à leur perte. "


Les Français de l’an 40

Richard Werly, créée le 31-05-2020

"En temps normal, c'est à dire si le Covid n'avait pas bouleversé nos vies, la presse et les librairies focaliseraient sans doute sur le 80mème anniversaire de la débâcle française de 1940. Une suggestion de lecture parmi tant d'autres sur ces jours historiques : «1940, de l'abîme à l'espérance» de Max Gallo et surtout les deux tomes de Jean Louis Crémieux-Brilhac, désormais disponibles en poche sur «les francais de l'an 40». Avec ce slogan francais de la drôle de guerre qui démarre son chapitre premier : «Nous vaincrons parce que nous sommes les plus forts....» Sans commentaire ..."


Disparition de Guy Bedos et Jean-Loup Dabadie

Lionel Zinsou, créée le 31-05-2020

"Je voudrais dire mon émotion alors que viennent de nous quitter Jean-Loup Dabadie et Guy Bedos. Pour ma génération, c’est une blessure, on a l’impression que l’humour rebelle, l’impertinence, la liberté de ton ont beaucoup perdu avec ces deux-là. Réécouter les sketches de Guy Bedos bien sûr, mais je voudrais aussi recommander aux gens de lire le discours de réception à l’Académie Française de Xavier Darcos par Jean-Loup Dabadie. C’est un bijou d’humour et de légèreté, avec un soupçon de cruauté et énormément de bienveillance. "


Présence des morts

Philippe Meyer, créée le 31-05-2020

"Emmanuel Berl est à la veille d’une opération à laquelle il pourrait ne pas survivre. La pensée de sa mort le conduit à penser à ses disparus et les souvenirs qui remontent à sa mémoire sont déconcertants. Il écrit : « Les morts à la fois m’assaillent et me fuient Ils me ressemblent trop, ils se ressemblent trop peu les uns aux autres. Il y en a trop qui sont trop misérables. La mort leur prend plus que la vie ne leur avait donné. (…) Il me semble que, moi-même j’appelle ceux qui ne peuvent me joindre, comme je suis appelé par eux, et non moins vainement. »"